Suintement mobilise la scène rap de Kinshasa contre les violences policières

À Kinshasa, les bavures policières ne sont plus une rumeur : elles s’imposent comme une sombre réalité du quotidien, notamment pour les jeunes des quartiers populaires. Face à cette situation inquiétante, Suintement, figure montante du rap kinois, a choisi de ne pas se taire. Son moyen d’action ? Un morceau coup de poing réunissant 18 rappeurs de la capitale, pour dénoncer les abus à répétition des forces de l’ordre.

Un morceau collectif, une dénonciation puissante

Sur une production sombre, lourde et intense, Suintement orchestre un projet unique : 16 rappeurs et une rappeuse s’enchaînent au micro durant 12 minutes pour peindre le portrait glaçant de la répression policière à Kinshasa. Le refrain, à lui seul, claque comme un avertissement :
« Tika ko tambola, oko kutana na Kabasele » – autrement dit, évite de trop traîner dehors, tu pourrais croiser Kabasele.

Parmi les artistes réunis : Munkendi Nkoy, C2B, Bogo The GOAT, Fellow, Mobutu Satana, Deejay S, Kongo, Chiii, Chris la Dies, Bolo, Dr PM, Keurma, Général Magnéton, Zepekenio, Eke Latéral, Bem’s la Star et Wiz Baba. Un casting impressionnant pour un message qui l’est tout autant.

“Kabasele” : symbole roulant d’un système abusif

Derrière ce nom devenu tristement célèbre, le “Kabasele” désigne un bus anti-émeute de type Traveller Force. Utilisé par les forces de l’ordre pour des interventions musclées, ce véhicule est aujourd’hui craint pour des raisons bien éloignées du maintien de la paix. Pour beaucoup de jeunes, croiser le “Kabasele”, c’est risquer d’être interpellé sans raison, dépouillé, violenté, ou retenu arbitrairement… parfois contre rançon.

Un cri lancé le jour de l’indépendance

Le clip du morceau “Kabasele” a été dévoilé le 30 juin 2025, jour symbolique de l’indépendance de la République Démocratique du Congo. Un choix lourd de sens, destiné à rappeler que la liberté ne se limite pas à une commémoration annuelle, mais devrait se traduire dans le quotidien de chaque citoyen, à commencer par le respect de sa dignité.

Plus qu’un simple titre, “Kabasele” est un acte de résistance, un témoignage artistique fort et un signal envoyé aux autorités. Cette génération de rappeurs refuse le silence, et utilise la musique comme arme pour porter la voix de ceux qu’on n’écoute plus.

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