Tout ce qu’il faut savoir sur styck, vidéographe valant plus de 5 milliards de vues

Nous avons eu l’occasion interviewée LUCAS « Styck » MAGGIORI, directeur créative et directeur vidéo pdg de Day Light Production et Daymolition, actuellement aussi chef de projet chez YOUTRACE De la manière dont il prépare ses scénario et ses réalisations à sa vision du rap, on a pu lui poser quelques questions.

  1. Vous commencez la vidéo en 2008. Qui vous a le plus inspiré dans ce domaine ?

A la base, j’ai toujours baigné dans un environnement artistique, je me suis beaucoup intéressé au dessin et à la peinture pendant des années. J’ai d’ailleurs fait partie durant mon adolescence de plusieurs groupes de graffiti parisien. Mais bien que passionnante ce n’était pas une activité que je pouvais transformer en un métier. 

J’ai toujours, depuis aussi loin que je m’en souvienne, été un grand passionné de rap, que ça soit français ou américain. Le rap new yorkais est une de mes plus grandes influences, parce que ça ressemble à ce qu’on vivait en France, on a des codes visuels qui se ressemblent (les bâtiments en brique, le métro aérien, etc.)

Donc je dirais que les anciens clips de rap New Yorkais comme Mobb Deep ou Nas pour le côté « Streets réalité », et les grosses productions d’hype williams des années 90, c’est ce qui m’a influencé le plus.

  • Comment la connexion avec Daymolition s’est établie et qu’est-ce qu’elle vous a apporté dans votre carrière ?

Daymolition est né de la rencontre entre Screetch (Richard Bismuth, mon associé) et moi, c’est notre bébé. Pour dire la vérité c’est la base, c’est ce qui nous à permit à lui de nous former, à la fois de s’entrainer sur le terrain et d’apprendre le business. C’est aujourd’hui un projet qui marche, mais c’est avant toute chose, une sorte d’état d’esprit mélange de débrouillardise et de surproduction que Screetch et moi avons construit, et que partagent aujourd’hui nos équipes. C’est également notre humble contribution au développement du rap en France, en permettant de mettre en lumière des jeunes artistes qui n’aurait pas forcément accès aux medias. 

  • Daylight Prod. Parles-nous un plus sur ce projet ? D’où l’idée vous est venue ? Et où en êtes-vous ?

Daylight prod, est la suite logique de Daymolition. C’est son extension. Daylight est la société de production qu’on a créée pour répondre aux demandes de clips de clients qu’on avait grâce à Daymoltion. À la base, on voulait signer nos clips avec le même logo que pour les vidéos du site, mais comme Daymolition est un media, les chaines de tv et les autres sites ne voulaient pas diffuser nos productions parce que ça revenait à faire de la pub pour un concurrent. On a donc décider de trouver un autre nom pour signer nos clips, c’est la naissance de Daylight.

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Direction Kinshasa #RDC

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Pour être honnête, c’est Gims, qui a permis à Daylight de s’installer et de grandir, il nous a fait confiance depuis le départ et nous a confier la réalisation de quasiment tous ces clips depuis qu’il s’est lancer en solo. De là sont nés des clips comme « J’Me Tire » ou « Bella », qui ont considérablement accru notre popularité.  

A la base il n’y avait que moi et Screetch, on travaillait en binôme. Puis nous avons été rejoints par Sankoumba, Kaleel, Nath, et Shems qui réalisent également des clips au sein de Daylight.

Daylight prod est aujourd’hui une de nos filiales, les vues totales de nos clips doivent avoisiner les 5 milliards, on a travaillé pour un très grand nombre d’artistes francais et africains, et on continue de le faire.

4. Vous avez travaillé en Afrique et en Europe. Qu’elle différence faites-vous dans la manière de fonctionner de travailler des artistes de deux continents ?

Les réalités sont différentes, notamment à cause des maisons de disques qui sont moins omniprésentes en Afrique. Ça permet aux artistes d’être plus décisionnaires et plus directement impliqués dans le processus créatif des vidéos, comme le serait un artiste indépendant en France. Mais ça diminue considérablement leurs possibilités en termes de budget. C’est un avantage ou un handicap, dépendant des cas.

Styck ( Réalisateur ) : Pour ma part travailler en Afrique, a été plus facile je pense, que pour d’autres réalisateurs, grâce notamment à Daymolition, j’ai été formé à essayer de faire au mieux avec le moins possible, que ça soit en terme de budget ou en terme de technique et de matériel, qui sont parfois indisponible dans certains pays africains. Mais les choses évoluent vite, le matériel aussi, les jeunes réalisateurs ou techniciens africains regorgent de talents et d’ingéniosité donc pour moi tout ça c’est un faux problème.

En revanche, la ou ça a été différent et ce que j’ai changé en moi avec mon expérience en Afrique, c’est surtout de me défaire de l’image « occidentale » que je pouvais avoir de l’Afrique. La plupart des clips tournés en Afrique par des européens, se veulent toujours exotiques, avec un étalonnage orangé pour représenter la chaleur, et un côté misérabiliste. 

Je me suis moi-même retrouvé à faire ce genre de clips ou de propositions à des artistes, j’ai compris plus tard que c’était une manière assez européenne de percevoir l’Afrique, qu’ici ce n’était dépaysant pour personne, et qu’il y avait bien d’autres choses à montrer de ce continent.

Les artistes africains veulent aujourd’hui, être comparés et en compétition avec des productions européennes ou américaines, avec les moyens qu’on m’octroie j’essaye de répondre au mieux dans ce sens, sans pour autant travestir l’identité africaine des artistes.

5. Aujourd’hui un passage obligé des artistes africains et européens. Comment vous recevez toutes ces fleures que les artistes ne cessent de vous jeter ? 

Pour être honnête, c’est très gentil, mais je ne m’y attarde pas. À la base je suis un homme de l’ombre. C’est les artistes africains qui m’ont toujours poussé à m’exposer davantage sur le devant de la scène, parce que c’est comme ça qu’on se forge un nom ici. Donc je l’accepte et je m’en amuse.

Mais ce n’est pas ma manière d’aborder les choses, pas ma nature, je préfère laisser mon travail parler pour moi. Mais si ça peut m’amener de nouveaux projets et aussi inspirer des jeunes du continent qui auraient envie de se lancer, alors je joue le jeu.

6. Ferre Gola et Fally Ipupa se sont offert vos services. Comment vous êtes rencontres. Raconte-nous cette  aventure

Avec Ferré on s’est rencontrer chez lui à Kinshasa, j’avais été missionner par Dawala du label Wati-B qui voulait que je réalise le clip de son featuring avec Dry. C’est Charles Tabu qui m’a reçu et qui a fait le lien entre moi et Ferré. C’est un excellent souvenir, c’était ma première fois à Kinshasa.

Fally, en réalité je connaissais son chef de projet chez Warner à Paris, avec qui je collaborais déjà depuis longtemps et puis j’étais aussi déjà très ami avec Dj Arafat.

Je pense que c’est grâce a leurs deux recommandations, que Fally a fait appel à moi pour réaliser quatre clips sur son album Tokooos.

Depuis on est devenu ami, on se croise souvent en France ou en Afrique. C’est quelqu’un avec qui je suis toujours content de travaillé.

J’ai beaucoup aimé faire le clip « Posa » à Kinshasa, parce que c’est en quelque sorte une carte postale, une invitation à découvrir cette grande ville, que ça soit ces quartiers populaires ou des coins plus chics. 

J’ai l’impression que ce clip, c’est un peu une compilation de mes souvenirs de Kin… et puis j’aime trop cette chanson. 

7. A ce jour, quels sont les collaborations qui sont dans votre agenda ? 

J’espère continuer de travailler avec les artistes avec qui je travaille déjà bien sûr, comme Gims, Dadju, Fally Ipupa ou Sidiki Diabaté.

Mais je vais essayer dans les années à venir de multiplier les collaborations avec des artistes anglophones, histoire de m’ouvrir à d’autres processus de création et de travail, et d’élargir aussi mon champ d’action.

8. Quels sont vos projets d’avenir ?

Depuis quelques mois, ce qui occupe mon temps c’est la création d’une plateforme appelée YouTRACE. C’est un projet que j’ai créé avec le groupe TRACE,  qui nait de ma rencontre, et des idées partagées avec Jean-Michel Bonnard, un des directeurs de TRACE en France. 

Suite à cela, le CEO de Trace, Olivier Laouchez, m’a fait confiance, en se basant sur mon expérience de Daymolition, pour développer une structure semblable, mais à destination du continent Africain.

La plateforme proposera la réalisation de clips, avec trois gammes de prix, vraiment accessibles au plus grand nombre, la mise en ligne des clips d’artistes, et aussi leur promotion digitale. Nous avons déjà des équipes dans 13 pays africains, dont la RDC, le Congo Brazzaville, la Cote D’ivoire, le Senegal, le Cameroun, le Mali, le Benin, le Gabon…

L’idée est de permettre à tous les artistes, de se faire connaitre du plus grand nombre, grâce à un media digital de TRACE, de faire éclore les futures stars de demain, et également de développer et de faire travailler des équipes locales, dans chaque pays, pour ce qui est de la réalisation et du montage.

Dans ce cadre j’ai d’ailleurs réalisé moi-même des clips YouTRACE pour chacun des ambassadeurs du projet dans chaque pays. J’ai donc évidemment fait appel à Gims pour représenter la diaspora en France, et aussi à Fally pour la RDC, à Sidiki Diabaté pour le Mali, Toofan pour le Togo, Fanicko pour le Benin, Shan’L au Gabon…

Le projet YouTRACE, réserve beaucoup de surprise, il sera lancé cet été dans les 13 premiers pays puis progressivement dans tous les pays d’Afrique. Nous sommes déjà en train de réfléchir à la prochaine étape, pour permettre d’accompagner et soutenir encore davantage les artistes confirmés ou en devenir.

À côté de ce projet je suis également en train de me pencher doucement sur l’élaboration d’idées pour mon premier long métrage. Je n’en suis même pas encore à l’écriture. C’est une étape importante, un nouveau monde, donc je préfère prendre mon temps…  

9. De 2008 à ce jour, c’est 12 ans. Qu’est-ce qui a changé dans votre vie de réalisateur ?

Beaucoup de choses ont changé !

Déjà, au départ moi et Screetch faisions tout nous-mêmes, les synopsis, l’organisation, le cadrage, la lumière, le montage, l’étalonnage et même la diffusion pour la partie Daymolition !

Aujourd’hui ma charge de travail n’a pas diminuée mais elle est différente et beaucoup plus axée sur la réflexion, sur les idées.

Apres il y a bien sur le fait que les moyens techniques ont beaucoup changé, les formats types 4k sont devenus courant, la possibilité de créer des slow motion facilement etc… Ça change la donne, et ça permets a tout le monde de démontrer sa créativité, plus ou moins, sur un pied d’égalité en terme de technique. Ce n’était pas le cas quand j’ai débuté, où il fallait essayer de faire des clips « américains » avec un caméscope sony handycam ! 

10. Qu’est-ce qui vous a le plus marqué durant vos débuts jusqu’à ce jour ?

Je pense que ce n’est pas qu’une seule chose, c’est la somme de tous les souvenirs, les voyages, les anecdotes que j’ai vécues jusqu’ici grâce à mon travail. Je n’ai pas fait d’études particulières dans le cinéma ou la vidéo, ni dans la musique ni dans le web, mais c’est la passion et l’acharnement qui m’ont amené où je suis. Je n’aurais jamais cru que ce que je faisais en 2008 m’amènerait à me retrouver à tourner un clip dans un désert à dos de chameau, ou a parler avec Lil wayne  devant une rolls royce au port de Miami, à obtenir un prix de meilleur réalisateur étranger en RDC, à deux doigt de me faire dévorer par un lion avec Gims en plein Paris, ou à me retrouver seul avec lui en haut d’une montagne enneigée après s’être fait déposer par un hélicoptère… à visiter autant de pays, rencontrer autant de gens. C’est ce qui me marque le plus. 

11. Aviez-vous une information particulière à nous livrer à cet instant ? 

Que YouTRACE, le projet que je monte actuellement avec le groupe TRACE, est ouvert à tous les artistes, quel que soit le style musical, leur age ou d’où ils viennent. Que j’essaye de rendre ce qu’on m’a pas forcement donné. Et que pour faire des films on a juste besoin d’un truc qui filme (comme dirait Orelsan).

C’est les idées qui sont précieuses, pas la marque de la camera

Un grand merci à tous les artistes, et toutes les équipes de tournages, avec qui j’ai eu la chance de bosser ces dernières années. Et une grande pensée pour mon frère Dj Arafat, qu’il repose en paix

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